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14 octobre 2021 | 8:45 CET

L’aménageur, révélateur d’un milieu urbain non constitué

Par Vanessa Panetto, directrice stratégies et innovation, Paris Sud Aménagement
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Place du Grand Ouest à Massy – Agence 2 Portzamparc. © Takuji Shimmura
Par Business Immo Staff
Business Immo

Des lieux et des liens

L’aménagement est le fruit d’une collaboration étroite entre la ville et l’aménageur, en partageant des ambitions autant avec les habitants qu’avec l’ensemble des acteurs locaux désireux d’y jouer un rôle. De nombreux lieux périurbains sont victimes de morcellement urbain et disparaissent de l’esprit et de l’usage des habitants. La proximité réelle de ces lieux est oubliée et remplacée par le sentiment d’une distance importante entre des quartiers. À Massy par exemple, ce sentiment est lié à la présence des infrastructures de transport. Or, l’aménageur a porté un regard optimiste sur les infrastructures en les dépassant, révélant des potentiels en imaginant des liaisons et des parcours.

L’étude urbaine « Des lieux et des liens », réalisée avec l’agence d’architecture et d’urbanisme Barrault-Pressacco et Atelier Georges pour la concertation, a révélé cette zone de tension entre l’agglomération parisienne et la couronne rurale dans laquelle est située la ville de Massy : un espace stratégique pour l’aménagement francilien. Ce lien entre périurbain et urbain permet que la qualité de vie rejoigne l’usage. La concertation multi-acteurs et multiniveaux a eu pour objectif le rassemblement des populations et une acculturation à l’espace et au territoire, domaine réservé aux professionnels, partagé alors avec les usagers. Elle a « diminué » la distance et recousu le lien souvent distendu entre les acteurs de la ville : ceux qui la font, ceux qui la vivent.

Un révélateur d’intensité de la ville

Que ce soit par la réflexion sur les rez-de-chaussée en ville ou la transformation de lieux hybrides, l’aménageur peut rendre la ville plus intense. Par exemple, PariSudam s’est rendu propriétaire d’un bâtiment de 10 000 m² sur trois niveaux au cœur de Massy-Atlantis, l’Atlante. À usage de bureaux, datant de 2004, il est voué à être démoli d’ici trois à cinq ans afin de laisser place à une nouvelle vie de quartier – logements, commerces, bureaux et infrastructures – qui sera influencée par les résidents temporaires du lieu. Le modèle économique permet à divers porteurs de projets (entrepreneurs, start-up) de produire leur activité grâce à un loyer accessible et à la création d’un écosystème. Une préfiguration pérenne. Par ce tremplin, l’aménageur soutient le développement économique, écologique et social du territoire tout en testant de futurs usages.

Dans la même veine, PariSudam transforme actuellement un joyau du patrimoine ferroviaire, une ancienne gare Art déco des années 1930. L’aménageur crée un lieu de destination à intensité urbaine et programmation hybride qui, hormis le restaurant bistronomique comme point de départ à l’appel à manifestation d’intérêt lancé début octobre, est ouvert à la créativité des candidats. Dotée d’une position stratégique et visible, à l’entrée de ville, dans un quartier actif au pied d’un hub de transports et au cœur de la requalification de l’avenue qui le dessert, la « gare » possède un rez-de-chaussée de 150 m² avec terrasse dédiée à un restaurant associé à une programmation hybride à haute valeur ajoutée, pour un public en quête d’Île-de-France.

L’art au service de l’urbain

Utilisé par l’aménageur pour créer l’apaisement en milieu urbain, l’art révèle le « non perçu » de la ville. C’est pourquoi PariSudam crée une nouvelle filiale destinée à penser les projets artistiques au moment de l’aménagement : un fonds de dotation en art urbain. L’art collabore à la compréhension de la ville par ses usagers. Art appliqué à l’urbain, design, il « fait le beau » ; utile, il devient « art service ». Il est alors un élément de sociabilité, de médiation ; c’est le travail mené avec un artiste et la société civile dans plusieurs quartiers où l’aménageur opère. Il permet aussi de rendre plus appréciable la déambulation, de raccourcir le temps, de rendre aimable la ville, une composante de notre métier.

Mais une brique supplémentaire peut révéler la ville en profondeur. Après avoir créé La Foncière – un outil de portage foncier afin de mieux maîtriser le processus de création de valeur –, s’être engagée auprès des collectivités pour la préservation et le renforcement de l’offre commerciale en pieds d’immeubles dans les centres-villes, généré une filiale dédiée à l’achat de murs commerciaux – rez-de-ville, foncière qui éveille les rez-de-chaussée –, PariSudam entend aussi bousculer l’image des villes.

Redonner une identité au territoire

Au-delà des différentes briques construites au fil des années par l’aménageur, une compétence nouvelle a émergé chez PariSudam, celle de la transformation identitaire pour rendre un territoire attrayant. C’est à la fois une capacité à poser un diagnostic de l’existant en valorisant les forces tout en interrogeant le « moins attrayant » ; mais également une recherche de positionnement et d’image auprès des publics de la collectivité pour asseoir une identité forte, aux valeurs définies et en phase avec le projet urbain de celle-ci.

C’est le cas à Chanteloup-les-Vignes où, 30 ans plus tôt, le tournage du film La Haine abîmait la vision de la banlieue. Or, plutôt que d’effacer une image « sensible » qui colle à la peau de cette ville entre bourgs et quartiers, PariSudam parie sur le fait d’utiliser cet argument et de le détourner : et si la haine devenait la joie ? C’est une refonte profonde de son identité que l’aménageur est en train d’opérer au-delà du renouvellement du quartier La Noé. Cette mission ne peut être efficace sans effectuer une veille active dans le secteur de la communication auprès de réseaux d’acteurs reconnus et de territoires qui ont fait le pari du pivot de leur positionnement au service leur attractivité. Elle interroge les possibles et utilise des outils de communication détonants et une façon d’imaginer les choses avec pep’s et joie de vivre. Un vrai pas de côté qu’on a envie de s’autoriser, une fois de plus.


Article issu du numéro 179 de Business Immo Global.

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