Tout le monde a été pris à contre-pied par l'évolution du marché de l'immobilier en 2010. Les prix dans l'ancien ont grimpé de 6,7% sur l'ensemble du territoire et les transactions de 24,5%. 24,5% alors que la croissance de l'économie française est restée bloquée à 1,5%. 24,5% alors que le taux de chômage n'a pas réellement décroché des 10% et que l'inflation s'est attaquée aux faibles, très faibles augmentations salariales.
Le paradoxe n'est qu'apparent. Si l'immobilier a été à contre-courant l'année dernière c'est grâce à la conjonction, rare, de deux facteurs. D'abord, le contexte financier. Les taux des crédits habitat sont descendus à des niveaux exceptionnellement bas. Les plus bas enregistrés depuis la Seconde guerre mondiale. De quoi susciter l'envie et inciter de nombreux futurs acheteurs à franchir le pas. Ensuite, le contexte boursier. Non seulement le CAC 40 s'est inscrit sur une tendance baissière entre décembre 2009 et décembre 2010 (-3,3%) mais surtout, sa volatilité a été très forte. De quoi faire fuir les investisseurs et les précipiter vers la pierre, LA valeur refuge par excellence. Une simple illustration. Jamais les Français n'ont autant investi dans les SCPI ! Les SCPI, ce placement qui consiste à acquérir des parts de sociétés qui achètent des immeubles (de bureaux, de commerce ou d'habitation) pour les louer. La collecte a quasiment été multipliée par 3 en 2010 et a atteint 2,46 milliards d'euros. A ce niveau là, ce n'est plus une simple accélération mais un emballement.
Alors pourquoi prévoir un tassement des marchés de l'immobilier en 2011 et 2012 ? Tout simplement parce les deux piliers sur lesquels s'est bâtie l'envolée de 2010 se lézardent. Regardons du côté des taux d'intérêt. Le mouvement qui avait permis de réduire de près de 175 points de base le niveau des taux moyens entre le 1er trimestre 2009 et la fin 2010 est désormais terminé. La tendance est à la remontée et les meilleurs taux s'éloignent. Ceux proposés par les différentes banques depuis début janvier sont effectivement supérieurs à ceux de décembre d'environ ¼ de point. Ensuite, la Bourse est sortie de ses hésitations. Elle affiche maintenant une nette tendance haussière. La barre symbolique des 4 000 points a été franchie et le seuil des 4 100 est aujourd'hui testé. Dans le même temps, l'ensemble des fondamentaux qui soutient l'économie n'est toujours pas au vert. Perspectives de croissance limitées, force du chômage et faibles gains de pouvoir d'achat restent toujours et encore d'actualité.
Si l'on comprend bien pourquoi les prix de l'immobilier ne peuvent plus flamber, une chute brutale n'est-elle pas le scénario le plus probable ? En effet, la capacité d'achat immobilier des ménages est proche de son maximum. Il faut désormais une vie entière d'épargne pour acquérir son habitation. Sur longue période, comme vous pouvez le voir sur ce graphique, le prix d'un logement représente en moyenne 2,7 années de revenus. En 2010, il en fallait plus de 4. Un simple retour dans le couloir « normal » des fluctuations et c'est une chute instantanée de 21% des prix. Retrouver la moyenne de long terme et c'est un effondrement de 35%. Certains le pensent. Ce n'est pas mon avis. Ce n'est pas mon avis pour trois raisons. Première raison, la décennie écoulée a été marquée par une modification radicale dans le crédit à l'habitat. Je veux parler de l'allongement de la durée des prêts. En 2000, les emprunts de plus de 25 ans représentaient seulement 0,8% de l'ensemble des crédits contractés par les ménages pour accéder à la propriété. 10 ans plus tard, cette part atteint plus de 25%. Ce n'est pas une simple évolution mais une révolution qui a permis aux ménages de digérer l'essentiel de la hausse des prix en relevant leur capacité d'achat.
La deuxième raison est démographique. La population française augmente. Sur les 10 dernières années, le nombre d'habitants s'est accru de 3,5 millions soit de 6%. C'est rapide. Mais moins que la hausse du nombre de ménages. Car, outre l'effet purement démographique, sont à prendre en compte des tendances sociétales comme la multiplication des familles monoparentales ou le nombre de personnes vivant seules. Cela tend à réduire le nombre de personnes vivant sous le même toit. Ce qui augmente donc d'autant les besoins d'habitation. La troisième raison est liée à l'offre et renvoie à la faiblesse chronique de la construction neuve. Malgré des années record en la matière, les mises en chantier ont été en moyenne de 385 milles dans les années 2000. C'est à peine suffisant pour absorber la nouvelle demande. C'est surtout très insuffisant pour combler le déficit estimé à 1 million de logements. Coincés entre des ménages qui ne peuvent plus, ou presque, injecter plus d'argent dans un projet immobilier, et des raisons objectives qui propulsent les prix toujours plus haut, notre scénario est celui d'un ralentissement progressif des prix en 2011 à 3% environ puis de leur stabilisation en 2012.
Ce scénario d'ensemble souffre de nombreuses exceptions régionales. Car attention, si décalage il y a, ce n'est pas seulement entre Paris et la province. Les prix des centres des grandes agglomérations ont progressé en 2010 à peu de choses près comme dans la capitale, soit 10% en moyenne, contre une hausse nationale de 6,7%. Cet écart entre les grandes villes et le reste du pays n'est évidemment pas une nouveauté. Mais cet écart s'est creusé. La carte de France immobilière ressemble ainsi à une peau de léopard. Une peau de léopard où les taches brunes représentent les grandes agglomérations aux bassins d'emplois dynamiques ou dotées d'atouts géographiques et climatiques. Dans ces zones, les marchés de l'immobilier vont restés tendus. Les zones plus claires représentent les alentours des communes moins recherchées, où l'offre est plus abondante.
Et après, à plus long terme ? La volonté des Français d'accéder à la propriété est intacte. Le décalage entre l'offre et la demande est loin d'être résorbé. Aucun doute : les prix se maintiendront à la hausse d'ici 2015. Mais une hausse limitée, que nous estimons à Xerfi à 1,6% en moyenne entre 2013 et 2015. La hausse va se faire grâce à Paris, dans les centres des grandes capitales régionales et dans les régions stars. Dans beaucoup d'autres zones en revanche, en particulier celles qui sont éloignées des grands centres, les prix vont flancher. Comme souvent, à la moyenne, il n'y a personne.
Source : Xerfi
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24 février 2011 | 14:36 CET
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