New Generation

Du plus loin qu’il s’en souvienne, Antoine Frey a toujours eu la soif d’entreprendre. C’est son père, autodidacte, et son oncle qui lui ont transmis le virus dès son plus jeune âge. Les deux hommes ont un parcours aussi riche qu’atypique. Après avoir fait du porte-à-porte pour vendre des téléviseurs à 16 ans, les deux frères ont mis sur pied un groupe puissant dans l’immobilier ainsi que dans les vins et les champagnes. « Mon père m’a appris la culture du travail et le goût de l’effort », lance, en préambule, le jeune patron. Des valeurs fondamentales qu’il conservera chevillées au corps au point d’en faire une religion. Bon élève, plutôt penché sur les lettres, le jeune rémois passe toute sa scolarité chez les Jésuites. Son Bac A1 en poche, il gagne, avec raison, les bancs de l’université Robert Schuman de Strasbourg pour faire du droit. Sans vocation précise mais avec une ambition certaine : s’accomplir dans une entreprise, SON entreprise, et gagner son indépendance. À peine inscrit en fac, le jeune provincial – et fier de l’être – n’a qu’une idée en tête : créer sa boîte. A 20 ans, il monte donc, avec un copain, un journal étudiant : "Le Malin" qui connaît un succès d’estime. Tirée à 30 000 exemplaires par semaine, la feuille de chou gagne de l’argent en vendant de la pub aux commerçants strasbourgeois. Elle gagne surtout du crédit auprès des milieux estudiantins. Cette expérience lui permet, de fil en aiguille, de monter des opérations de marchands de biens puis de se payer, toujours avec le même associé, le fonds de commerce d’une brasserie de la capitale alsacienne. « C’était un rythme infernal, une période grisante. Nous travaillions 7 jours sur 7. Notre journée commençait à 7 h avec l’ouverture de la terrasse. Nous enchaînions alors avec la vente d’espaces publicitaires pour notre journal. Puis nous revenions pour le service du midi à la brasserie et ainsi de suite », se souvient Antoine Frey. Dans cet emploi du temps digne d’un homme d’affaires, la place pour les études était réduite à la portion congrue. Il décroche pourtant tous ses diplômes universitaires avec mention. En 1997, un événement tragique va venir enrayer cette belle dynamique. La mort de son père d’un cancer foudroyant engage le jeune entrepreneur à rentrer au bercail. Aîné d’une famille de trois enfants, Antoine Frey souhaite revenir auprès des siens. Sans hésiter et sans ciller, il revend le journal étudiant et les parts de la brasserie à son ami de fac. Ce dernier est aujourd’hui l’un des plus gros restaurateurs de l’Est de la France avec 450 employés sous ses ordres et plusieurs enseignes de renom dans son giron. « Je suis très fier de mon ami. Sa réussite est formidable », lâche Antoine Frey. Cet ami est aujourd’hui l’un des membres de son conseil de surveillance. La fidélité est une vertu qu’il pratique en silence.