D’ordinaire, une crise s’accompagne d’une vague de destruction de richesses et d’emplois. Aujourd’hui, le consensus converge vers un ralentissement, voire une récession économique cette année. Il est également quasi unanime pour annoncer un changement de cycle dans l’immobilier, bercé par le ronron d’une décennie d’argent pas cher.
Et pourtant, cette morosité dans le climat des affaires ne se reflète pas totalement dans les statistiques. Le chômage continue de baisser en France, atteignant son plus bas niveau depuis une décennie à 7,3 %. Les difficultés de recrutement des entreprises persistent, et ce dans quasiment tous les secteurs économiques. L’immobilier se retrouve aussi dans le même bain, tiraillé entre la nécessité de réajuster ses effectifs pour passer la crise ou conserver ses talents de peur de ne pas en retrouver demain. Choix cornélien pour des brokers en panne de transactions ou des promoteurs dont les permis de construire ne sortent plus.
Cette équation quantitative se double d’une inconnue qualitative. La crise qui frappe l’industrie immobilière n’est pas seulement financière ou économique. Elle est aussi structurelle, la filière étant sommée de décarboner ses activités. La volonté des décideurs est enfin là. L’argent aussi, fléché par les nouvelles réglementations. Les bras sont à trouver. Il faudra aller les chercher. Chez son voisin ou un peu plus loin. Il faudra aussi et surtout former ces nouvelles compétences. Et ce très rapidement si l’on veut rester dans le calendrier dicté par l’urgence climatique.
De ce formidable chantier, il manque manifestement un maître d’ouvrage à la hauteur. L’État-providence brille par son absence en France. L’ambition impulsée par l’Accord de Paris se heurte à une vision étriquée et un manque de courage politique. Elle se dissout dans un magma de dispositifs plus complexes les uns que les autres, qui pourrait en décourager plus d’un. Sauf à ce que les compagnons s’emparent du sujet et taillent eux-mêmes leur pierre.
L’enjeu de la filière dans les prochaines années sera de réinventer ses métiers pour transformer ces crises conjoncturelles comme structurelles en autant d’opportunités. Si l’on a réussi à financiariser l’immobilier ces dernières décennies, qui peut croire qu’on ne pourra aussi le décarboner. Surtout si le premier se met au service du second.
Article issu du Business Immo Global 192.
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